Récemment, j’ai eu la chance d’entretenir des jeunes féministes sur le burn-out. C’était improbable pour moi et j’avoue m’être demandée avant de mettre pied dans la salle, ce que je pourrais bien leur raconter. “Google est ton meilleur ami pour tout apprendre de nos jours” disent-ils. Dans mon cas, je n’avais pas besoin de me rendre sur Google pour savoir ce qu’est le burn-out militant, ce qu’est l’épuisement. Ces choses je les connaissais très bien car je les ai vécues. Je ne suis d’ailleurs pas sûre de m’en être complètement remise.
C’en était devenu presque comme un poids m’empêchant d’être moi, d’être heureuse dans ce que je fais, dans l’expression de mon plein potentiel. Alors j’ai commencé à me poser des questions, à creuser loin.
Évoluant le plus dans des cercles féministes, j’ai eu à demander à beaucoup de mes sœurs si elles avaient la même chose que moi. Si elles étaient épuisées, lasses de tout. Mais surtout, je me suis demandée ce qui pourrait en être la cause. Nous sommes trop jeunes pour crouler sous l’épuisement. La vérité est que toutes autant que nous sommes, nous nous investissons corps et âme dans ce combat. Au quotidien nous y mettons beaucoup de nous sans chercher à nous protéger.
Hormis tout le travail que nous abattons chacune de nos côtés, il y a ce à quoi le combat nous expose. Les attaques du dehors, les remises en question permanentes, les moments de doutes, la charge mentale et tout le tralala. Que tu choisisses d’être une féministe engagée dans une organisation ou une féministe libérale, peu importe la façon dont tu vis ton féminisme, il y a la charge mentale qui l’accompagne.
Par expérience je peux vous raconter ces soirées à pleurer sur mon matelas parce que je pensais être seule contre le monde, totalement incomprise. Je peux vous parler des frissons et des moments de baisse émotionnelle quand tu apprends un nouveau cas de viol, quand tu apprends que telle a été tuée par son compagnon et que tu te regardes et te dis : mais à quoi je sers si je ne peux rien pour elles ?
Je peux vous parler de ces moments où tu as envie de tout abandonner, de t’en aller loin mais que tu te rappelles que tu es liée à vie. Je peux aussi vous entretenir sur ces moments où tu as juste envie de parler à quelqu’un, de te vider, de te sentir moins seule et comprise. Je peux vous parler de ces moments après que tu aies lu une insulte sur ta personne, tes parents alors que tu ne faisais que défendre tes droits, alors que tu ne demandais que le respect en tant qu’humaine.
Il y a beaucoup de choses dont je pourrais vous parler mais ce n’est pas comme si vous ne le saviez pas ou que vous ne les viviez pas au quotidien. Je sais que plus d’une fois vous aviez eu envie de pleurer ou que vous l’avez fait à cause de ce combat que l’on mène. Je sais que le plus souvent vous vous sentez impuissantes et fatiguées. Seulement, on ne parle presque jamais de cela dans nos assemblées.
Le patriarcat, il est fort. Il nous fait enrager, il nous met en colère, il nous fait suer, nous battre pour survivre. Il nous arrache tout. On se bat contre lui corps et âme au point où l’on s’oublie. Chaque fois que j’y pense, je deviens mélancolique. J’ai parfois besoin de compter, de cesser d’être une superwoman, d’être celle qui sait crier…J’ai besoin d’aller bien. C’est seulement en bonne santé, en bon état mental, en harmonie interne que je pourrai être utile à la cause. Mais ça je l’oublie souvent et cela vaut pour vous aussi.
Après mes longues réflexions et mes discussions avec des amies j’ai décidé d’écrire cet article pour vous proposer quelques soins personnels. Des soins pour vous, pour entretenir votre corps et votre âme. Des soins pour aller bien et trouver l’équilibre. Ce sont des soins que je tente moi-même de pratiquer. Je fais des efforts entre les injonctions à la lutte et mes besoins d’aller bien pour cette même lutte. On y va :
S’il ne vous est jamais arrivé de prendre du temps pour vous chaque matin afin de vous rappeler la personne que vous êtes, combien vous êtes formidable et combien votre travail compte alors c’est le moment de commencer à le faire. Ça vous fait gagner en confiance, vous rend moins irritable et donc d’attaque pour survivre aux agressions externes.
Offrez-vous de temps à autre des moments de détente loin de votre environnement de travail et des personnes que vous côtoyez au quotidien. Allez rendre visite à des gens que vous aviez vu il y a longtemps, isolez-vous loin, prenez du temps loin du stress. Offrez-vous le plus souvent des moments de relaxation. Une balade à la plage, un moment de spa ou si vous êtes aussi financièrement fauchée que moi, organisez vos moments de soins de corps entre copines avec des produits faits maison pas coûteux.
Essayez-vous à d’autres choses, d’autres activités comme le bricolage, le dessin, la musique, les activités manuelles… Faites de nouvelles choses qui vous aident à libérer votre esprit et votre créativité, des choses différentes de la réalité cruelle que nous réserve cette société d’oppressions.
La lecture n’est pas uniquement pour acquérir la connaissance, elle peut être apaisante. Offrez-vous les livres de vos choix et isolez-vous pour les lire dans le calme et vous emportez dans le récit. Que vous aimiez écrire ou pas je vous propose de vous acheter un carnet où vous écrirez vos émotions selon le besoin. Ça vous aide à réduire le stress quotidien et à vous connaître.
Peut-on vraiment se détourner d’internet de nos jours ? Mais vous n’ignorez pas tout le danger que cela représente pour nous d’être tout le temps connectés. Primo, je vous conseillerai de faire le tri des personnes que vous suivez et de mettre à la poubelle tous les contenus que vous jugez toxique pour vous. Assainir son environnement est le premier pas vers l’épanouissement. De temps à autre, éteignez téléphone, laptop ou tout autre appareil vous reliant au monde et retrouvez-vous avec vous-même. Créez des limites entre votre vie professionnelle et votre vie privée.
Je dois vous avouer un secret, je n’aime pas du tout le sport même si on ne cesse de me répéter que j’ai une forme athlétique. Mais, c’est un atout premium en matière de bien-être. Créez-vous une routine de sport et vous me remercierez plus tard. Si vous êtes fan de yoga, achetez-vous un tapis et faites un tour sur Youtube. Ou si vous pouvez vous le permettre, abonnez-vous à des cours de Yoga dans les institutions spécialisées. Apprenez à méditer dans le silence ou avec un air mélodieux… C’est apaisant.
Sachez vous reposer quand vous êtes fatiguées. Cessez d’être des warriors disponibles pour tout. Mangez sainement et hydratez-vous comme il se doit. Votre alimentation compte beaucoup pour votre bien-être physique et émotionnel. Créez-vous des cercles d’amies, des espaces où vous pourriez vous sentir libre de parler, de demander de l’aide, du soutien en cas de baisse émotionnelle. Des cercles basés sur l’amour et la bienveillance. Accordez-vous le droit d’être humaine, imparfaite et donnez-vous beaucoup d’amour. Ma liste n’est pas fameuse ni exhaustive mais j’espère que vous trouverez parmi les méthodes citées, celles qui vous iraient.
Je ne peux finir sans vous dire combien il est primordial pour nous en tant que militantes féministes de nous centrer sur les soins personnels et collectifs pour préserver notre bien-être mais également être plus efficientes dans le travail que nous menons. La route est longue. Je nous souhaite beaucoup de courage et de bonheur. Si vous avez des soins propres à vous, à partager avec nous n’hésitez pas à nous écrire.